Oct 03, 2013 FACON DE VOIR 4
Addis-Abeba, 24 mai 2013. 7 heures du matin, 15 degrés à peine. Les rues sont parées de messages de bienvenue et d’affiches relatives au cinquantenaire de l’OUA-UA. Des messages qui rivalisent avec ceux des forces de sécurité et les effigies du défunt Premier ministre éthiopien Meles Zenaoui. La capitale de l’Union africaine a manifestement mis les petits plats dans les grands pour accueillir les milliers d’invités, africains et étrangers, venus vivre un moment historique, voire unique, peu de gens étant susceptibles de couvrir deux cinquantenaires.
Placé sous le signe du panafricanisme et de la renaissance africaine, le cinquantenaire de l’OUA-UA fut l’occasion d’un retour critique et prospectif sur les idéaux fondateurs de l’organisation et ses objectifs: intégration, décolonisation, paix et prospérité notamment, avec en toile de fond «le discours de la méthode de Kwame Nkrumah», prononcé en 1963 à Addis-Abeba. Les différents panels constitués à cet effet, dans la matinée du 25 mai, permirent de mettre en lumière les avancées, mais aussi les échecs et défis du projet panafricain. Certes, à l’exception de la République arabe sahraouie démocratique, tous les Etats du continent ont acquis leur indépendance politique. Mais que vaut la liberté politique sans indépendance économique, sans souveraineté militaire, sans ressources humaines qualifiées, sans la paix, la démocratie, la prospérité, le progrès social, etc.? Telles sont quelques-unes des questions qui animèrent chaudement la réflexion, au point d’opposer des générations.
Car plus que jamais, les jeunes reprochent à leurs dirigeants actuels d’avoir trahi les idéaux des pères fondateurs et d’avoir sacrifié l’unité et l’indépendance du continent à des fins purement égoïstes, notamment leur pérennité au pouvoir. Addis-Abeba révéla ainsi officiellement et de manière fort solennelle une jeunesse africaine lassée d’être indéfiniment réduite à une opportunité à venir, au lieu d’être au présent une force au service de l’avenir.
La charge était sans doute trop lourde pour laisser indifférents les accusés qui, à l’instar du président ougandais Yoweri Museveni, répliqua vivement en rappelant que la jeunesse n’était pas une question de biologie, mais d’idéologie (de pensée), et qu’à confondre les deux, les jeunes finiraient par être aussi inutiles à l’Afrique que leurs devanciers. Malheureusement, les trois minutes imparties aux uns et autres ne permirent pas d’approfondir les débats. Pire, plusieurs dirigeants furent interrompus au terme des trois minutes qui leur était accordées; pratique qui fut diversement appréciée, les uns saluant la rigueur dans la gestion du temps, et les autres une gestion plutôt non africaine du temps.
Peu importe cependant, ces réflexions, ainsi que les discours, travaux et festivités qui marquèrent la suite des célébrations au Millenium Hall d’Addis-Abeba, le 25 mai, furent l’occasion pour nos dirigeants de plancher sur les problèmes du continent, de regarder en face ses limites, mais aussi son potentiel, de se réjouir de ses avancées en cinquante ans, de dénoncer l’impérialisme multiforme qui le menace, aux plans culturel, économique, politique, et même judiciaire, avec la CPI accusée de mener une chasse raciale contre les Africains. Qu’en retenir?
C’est à l’aune des objectifs fondateurs que l’on peut sommairement ébaucher un bilan de ce premier cinquantenaire. L’intégration et la décolonisation sont à mi-chemin, la paix est au plus mal, les conflits armés étant aussi constants que le soleil sur le continent, comme le remarquait Barack Obama à Accra en 2009. Quant à la prospérité, malgré la croissance économique soutenue et élevée sur le continent, la population, et surtout les jeunes peinent à en percevoir les fruits. Une jeunesse de plus en plus nombreuse et inexorablement désœuvrée, et par conséquent déterminée à en découdre avec ceux qui retiennent son destin captif d’intérêts égoïstes.
C’est sur cette jeunesse que reposent les espoirs de ce cinquantenaire, ou plutôt du prochain à peine amorcé. Une jeunesse qui, à défaut de forcer les aînés à passer hic et nunc (ici et maintenant) la main, a le devoir historique de les obliger à opérer les ruptures et sauts nécessaires à une authentique émancipation du continent. C’est donc à eux, que dis-je, à nous, que revient de mener ou de poursuivre sans délai les combats nécessaires pour qu’à l’horizon 2063, et pourquoi pas avant, l’Afrique célèbre enfin le cinquantenaire de l’intégration réussie, de la décolonisation radicale, de la paix partagée et de la prospérité retrouvée.
© Notre Afrik N°34, juin 2013
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