Entre naïveté et illusions, « Les Rayures du Zèbre » utilise le football comme alibi pour aborder la difficile question des rapports culturels entre l’Europe et l’Afrique noire.
José Stockman (Benoît Poelvoorde) est agent de joueurs aux accents un peu colon, avec pour spécialité la recherche de jeunes pépites africaines, notamment dans les rues d’Abidjan, en Côte d’Ivoire. Il y a ses habitudes et pa- pillonne avec Gigi (Tatiana Rojo), femme de la rue. Un jour, il tombe sur Yaya Koné (Marc Zinga), joueur de rue bien décidé à taper dans l’œil d’un recruteur.
José le repère et l’emmène en Europe pensant en faire une star du ballon rond. Un scénario somme toute très simple, mais qui s’érige en fable pour conter des vies brisées et poser des questions qui appellent des réponses complexes : le rêve européen, les relations mixtes, la paternité, l’espoir, la réussite à tout prix…
Derrière ce film se cache la folle épopée de joueurs ivoiriens arrivés dans le petit club de Beveren (Belgique) au début des années 2000. Certains vont réussir (Yaya Touré, Gervinho…), tandis qu’on n’entendra jamais parler de ceux qui n’ont pas percé. A ce sujet, Benoît Mariage, le réalisateur, a énormément appris de Serge Trimpont, ancien recruteur de joueurs et collaborateur du centre de formation de l’Asec Mimosa d’Abidjan. L’ex-agent, qui avait notamment amené Aruna Dindané à Anderlecht, a largement influencé le scénario de ces anecdotes et autres réparties dont celle- ci : « L’éthique est un mot utilisé par les gens qui ont l’assiette pleine. »
L’Europe fait toujours figure d’Eldorado comme l’a encore prouvé la tragédie de Lampedusa en octobre 2013. Mais pourquoi ? « Car l’Afrique est de plus en plus pauvre. L’Afrique est de plus en plus en guerre », répond sans ciller l’Ivoirienne Tatania Rojo. Réussir en Europe n’est pas une sinécure, mais apparaît comme une obligation sociale, morale. Car en cas d’échec, le tabou reste omni- présent comme le confirme encore Tatania Rojo : « La honte, l’honneur, c’est, je pense, au-dessus de tout pour un Africain. C’est fort, c’est ancré, ce n’est même plus du mensonge. (…) C’est pour cela qu’il est important de montrer des films qui sensibilisent les gens à cette thématique.»
Un point de vue partagé par le Belgo-Congolais Marc Zinga : « Culturellement, la pression est très forte. La culture de la famille, de l’entraide, dans ce qu’elle peut avoir de pervers aussi est très forte en Afrique. C’est ce qui fait que la pression est double, ils sont obligés de réussir pour eux, mais aussi pour les autres. C’est ce qui fait que des mecs arrivent, ratent et disparaissent dans la nature. Tant de familles placent leurs espoirs dansungaminquipeutréussir,c’est cela qui pousse vers cet Eldorado-là. » Le ballon ou la faim, paradigme trop quotidien à Abidjan et dans le reste de l’Afrique subsaharienne. La réussite d’un jeune peut faire vivre une famille, un quartier, un village. « Ballon = Manger = Vivre. Yaya est dans cette vision fondamen- tale. Ce personnage raconte ce rêve qu’ont tous ces gars, il est même radi- calisé, puisqu’il vient de la rue et est encore plus perdu que tous les autres », précise encore le jeune comédien originaire du Katanga. Le person- nage de Yaya est d’ailleurs inspiré de Cheick Tioté, jeune ivoirien trouvé en guenilles et évoluant aujourd’hui pour les Magpies de Newcastle. Au-delà du football émerge cette question : pour un qui réussit, combien échouent ?
Damien Roulette
© Notre Afrik n°41, Février 2014.
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