Ebola, le drame et la psychose

Août 26, 2014 A MON AVIS, BLOG 0

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Depuis plusieurs mois, un drame sanitaire d’une ampleur certaine frappe le continent africain. Partie de la Guinée, la résurgence de la fièvre hémorragique Ebola a gagné le Liberia et la Sierra Leone. Puis le Nigeria, plus grand pays d’Afrique, qui aura enregistré au moins cinq morts. Cinq morts de trop, victimes d’une épidémie qui fait peur sous toutes les latitudes, au point que le Cameroun voisin a décidé de fermer toutes ses frontières — terrestres, maritimes et aériennes — avec le géant d’Afrique.

Tout comme le Kenya, jusque-là épargné par l’épidémie, qui a décidé de prendre des mesures préventives rigoureuses en interdisant l’accès à son territoire aux voyageurs venant de Guinée, du Liberia et de Sierra Leone. Alors, on ferme les frontières ici, on barre le passage là et le mal s’arrête ?

C’est avec une cruelle et funeste rythmique que chaque jour apporte sa dose d’Ebola. Au moment où nous bouclions cette édition, la propagation d’Ebola aura fait 1 146 morts en cinq mois, selon le dernier bilan de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). On dénombrait ainsi 413 personnes décédées de cette épidémie, « la plus grave depuis l’apparition de cette fièvre hémorragique très contagieuse en 1976 », au Liberia. Tandis que l’on a enregistré 380 morts en Guinée, 348 en Sierra Leone et cinq au Nigeria. Des chiffres implacables qui font monter la méfiance. Partout.

Tenez ! Frontex, l’agence européenne pour la gestion des frontières, a même décidé de « suspendre ses vols de rapatriement d’immigrés illégaux vers le Nigeria ». Pour le bonheur de ces immigrés qui doivent sans doute bénir ce moment de répit ! En tout cas, ces immigrés-là ont tout le loisir de se dire que décidément, « le malheur des uns fait le bonheur des autres ». D’autant que nombre de compagnies aériennes annulent leurs vols vers certaines destinations, mises en quarantaine, subissant ainsi d’énormes manques à gagner, tandis que se développe une psychose grandissante du vivre ensemble.

Il est clair que l’épidémie de fièvre hémorragique Ebola perturbe gravement les relations sociales et économiques ci et là sur le continent. Même le sommet extraordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine a fait les frais de cette situation sanitaire préoccupante. Prévu pour se tenir du 2 au 7 septembre à Ouagadougou, ce sommet axé sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté a simplement (et sagement ?) été ajourné. Une épidémie transnationale qui inquiète sur tous les hémisphères, préoccupe les politiques, laisse perplexes les instances et autorités sanitaires… ce n’est pas banal !

Il faut toutefois savoir raison garder et organiser la riposte avec hauteur et responsabilité. La psychose généralisée et la stigmatisation gratuite ne sauraient être des réponses adéquates à ce drame humain, qu’il urge de considérer dans toute sa gravité. Alors que l’OMS s’est vue obligée d’autoriser l’usage d’un remède expérimental pour tenter de circonscrire, sans aucune garantie d’y arriver, le mal qui ronge les espérances du moment, la communauté scientifique est désormais au pied du mur. Non pas simplement parce qu’Ebola sévit en Afrique — en Afrique de l’Ouest, préciseront certains esprits chagrins —, mais surtout parce que la panique ambiante est aussi une porte ouverte à toutes les dérives. Les réseaux sociaux ne bruissent-ils pas déjà de supposés remèdes sur ce mal terrifiant qui défie l’humanité ?

Plutôt que de se barricader artificiellement en pensant que « l’enfer c’est les autres », il faut plutôt prendre toute la mesure de cette menace commune et trouver au plus vite, ensemble, la parade. Ou périr.

 Par Thierry Hot

© Notre Afrik N°47, Septembre 2014

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• Ebola, épidémie, Guinée, Liberia, Nigéria, Santé, Sierra Leone

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